Il est 4 heures du matin. Les coqs commencent à chanter. Et je n’ai pas encore fermé l’œil. Ni Martin d’ailleurs. J’ai peur. Peur pour mon garçon, comme à chaque épisode de crise d’asthme aigu non contrôlable. Peur pour mon amour. Peur de cette ville meurtrière. Peur de cette nuit noire. Une peur viscérale de la part d’un cœur de maman. Mon petit garçon est parti avec son papa dans je ne sais laquelle hôpital, dont j’ignore la condition, dans une ville où le taux de criminalité est un des plus haut mondialement. Surtout la nuit. Et il fait nuit. Une nuit noire. Sans façon de le rejoindre. Je nous sens si vulnérable. Je m’efforce de faire confiance aux policiers qui sont venus afin de les escorter…

Honduras est un beau pays. Les gens sont aimable… du moins la plupart. Mais il y a beaucoup de problème d’argent, de drogue, de meurtre, de corruption, de pauvreté, de violence, de manque de travail. Pour le sensationnel, vous n’avez qu’à « Googler » pour en savoir un peu plus sur la situation. En réalité, nous nous renseignons auprès de tous ceux dont nous rencontrons. La plupart des gens rencontrés souhaitent malheureusement partir de leur pays natal dans l’espoir d’atteindre un meilleur avenir.

Dès notre arriver, nous avons constaté la situation mais j’ai voulu voir le meilleur. Les gens souriant, aimable. Par contre, peu à peu, la réalité fait surface et nous apparaît tel un tableau sombre. En discutant avec plusieurs Honduriens, nous savons mieux, nous connaissons. Ils sont heureux avec ce qu’ils ont mais ils n’ont quasi rien. La plupart se confi sans gêne, peut-être parce que nous sommes blanc ou parce que nous écoutons attentivement, mais la réalité est tel. Et nous discernons que leur sécurité est délicate…

Nous aimions aller courir dans les petites ruelles du quartier, chacun notre tour, jusqu’à ce qu’une moto me suive de près pour enfin m’arrêter et me dire de changer de direction car mon chemin emprunté était trop dangereux, à 14 :00! Je n’aime plus courir seule.

Le weekend suivant, une fête au village avait lieu et il eut beaucoup de bruit. Martin me réveilla vers 1 :00 du matin en me disant qu’il avait entendu un coup de fusil. Il va sans dire que nous dormons seulement sur une oreille. Effectivement, il eut un meurtre ce week-end là non loin de notre petit hôtel, sur la plage. Seulement un règlement de compte, nous disent-ils… mais nous nous refusons d’aller à la plage! Même les Honduriens s’abstiennent.

Le weekend d’après, nous avions besoin de tranquillité. Nous sommes allés sur une mini île paradisiaque. Seulement, le chemin pour s’y rendre était invraisemblable. Une heure de taxi puis une heure de barque à partir d’un village que certain ont peur d’aller et que d’autres me disent que c’est possible… de jour seulement. Pour une des rares fois dans notre vie, Martin autant que moi avons été obligés de faire confiance à notre destiné sur cette route. Le slalom entre les bus, les taxis, les trous dans la rue, la vitesse, les voitures qui accélèrent et ralentissent dangereusement, les voitures à sens inverse qu’on frôle de trop près, les piétons dans la rue…qui manque de si près de se faire enlever la vie, les motos qui arrivent d’un peu partout et qu’on manque de faire envoler. Nous avons l’impression de ne plus rien contrôler, que notre chauffeur tiens la vie de notre famille du bout de ses doigts…

Et le retour de la ville, La Ceiba, en taxi, après la tomber du soleil. Les Honduriens nous disent de ne pas faire confiance au taxi… Alors lequel choisir bordel! Je tiens mes enfants serrés dans l’auto, assis sur moi. Certains locaux nous confient qu’ils ne veulent absolument pas vivre en ville car c’est beaucoup trop dangereux. Évidemment, il y a des quartiers mieux mais comme cette ville semble similaire de quartier en quartier, nous devenons plus craintifs, avec nos 3 petits bambins. Ici, plus que jamais, la vie semble tenir à un fil, si fragile, si délicate, si éphémère…

Et samedi dernier, alors que nous revenons à la nuit tombante, un chauffeur de taxi bien aimable nous raccompagne. Celui-ci nous raconte comment il rêve de vivre ailleurs et sa réalité Hondurienne, dont le sentiment d’être en sécurité est ébréché. Juste avant de rentrer au village, dans le chemin engouffré par le noir, entouré de champs d’ananas, le chauffeur s’arrête sec. Un accident vient tout juste de se produire. Nous observons. Rapidement, nous voyons deux bambins de 12-14 ans allongés au milieu de la chaussé, un peu de travers, un vélo fracassé, plus aucun mouvement… du sang coule tranquillement et nous sentons leurs esprits les quitter… La voiture s’est enfuit. Aucune ambulance disponible. Aucune police ne pourra rendre justice. Aucune ressource pour aider ces deux petites victimes. Nous nous dépêchons d’aller alerter les pompiers non loin de la scène, conscient de la réalité. Leurs visages resteront graver longtemps…

Alors maintenant que mes 2 hommes sont partis, en pleine nuit, sans savoir où ni comment les rejoindre, oui,  j’ai peur. Martin est fort. Nelson est si fragile… Je dois faire confiance à la vie, je dois laisser aller, je dois me résigner et je dois patienter, impuissante…

Dire à un cœur de mère de ne pas s’inquiéter est comme ordonner à l’eau de ne pas mouiller. – Unknown

PS : Mes hommes sont enfin revenus au courant de la matinée à mon grand soulagement…

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14 Responses
  1. Simon

    Bonjour a vous!!! Je viens de lire ton texte sur le Honduras, et je me pose la question :Pourquoi reste a cette endroit si c est dangeureux pour ta famille? ( question sans jugement, juste un questionnement 😉)

    Christian

    Envoyé de mon iPhone

    1. Merci du non jugement ici! La réalité est dure mais il y a plus de vulnérabilité que de drame… nous avons eu peur et nous allons évidemment apprécier chaque moment à notre retour! Nous partons prochainement, notre mandat d’aide humanitaire terminé. Merci de votre soutien.

  2. berard

    pourquoi vivre dans la peur ? les angoisses maternelles excessives se traduisent chez l enfants par des fragilités pulmonaires et respiratoires.L asthme est un cri pour exprimer que ce qui se passe autour de l enfant ne le satisfait pas ,qu il vit la situation comme une agréssion .Il a besoin de protection mais aussi d espace pour respirer au sein de la famille……….lexique de .Michel Odoul

    1. Merci de votre partage! Oui, nous savons, et le mal de dos a Martin, mes cheveux blancs qui ont poussés excessivement, l’eczéma de mon autre garçon en sont tous la preuve que notre corps parle nos maux psychiques. Nous sommes sur le point de quitter le Honduras. Ce fut tout qu’une expérience…

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